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4 janvier 1959 – 4 janvier 2025 : Quid de la reconnaissance de l’ABAKO de Joseph Kasa-Vubu comme parti pionnier de la lutte pour l’indépendance ?

Par Elohim Mfinda

Le samedi 4 janvier 2025, la République Démocratique du Congo a commémoré la Journée des Martyrs de l’Indépendance, en mémoire des événements tragiques du 4 janvier 1959. Cette date symbolise un tournant décisif dans la lutte pour l’indépendance, marqué par des émeutes sanglantes à Kinshasa, ex-Léopoldville.

Ces troubles éclatèrent lorsque les autorités coloniales belges interdirent une manifestation prévue par l’ABAKO, l’Association des Bakongo pour l’unification, la conservation et l’expansion de la langue Kikongo. La répression violente qui suivit fit au moins 49 morts selon les estimations, bien que les chiffres exacts demeurent flous. Moins d’un an et demi plus tard, le Congo belge accédait à l’indépendance, le 30 juin 1960.

*L’ABAKO : Premier acteur politique de la lutte pour l’indépendance*

L’ABAKO, fondée en 1949 par Edmond Nzeza Nlandu avec un objectif culturel, adopta progressivement une posture politique sous la direction de Joseph Kasa-Vubu, qui en devint président en 1954. En 1959, le parti joua un rôle de premier plan en exigeant une indépendance immédiate et sans condition. Kasa-Vubu, qui devint le premier président de la République du Congo-Léopoldville, porta cette revendication jusqu’à son aboutissement.

Malgré son rôle historique, la reconnaissance officielle de l’ABAKO en tant que parti pionnier de l’indépendance reste marginalisée. Selon David Matadi Zola, président national de l’Alliance de Base pour l’Action Commune (ABACO), « dans certains pays, les partis ayant conduit les luttes pour l’émancipation nationale sont respectés jusqu’à ce jour, comme l’ANC de Nelson Mandela en Afrique du Sud. Pourquoi pas l’ABAKO ? Ce parti a conduit une révolution sans armes et a chassé les colons ».

Aujourd’hui, l’ABAKO s’est fragmentée en différentes entités, notamment l’Alliance de Base pour l’Action Commune (ABACO) et l’Alliance des Bâtisseurs du Congo (ABACO), dirigée par Anatone Matusilua. Cette fragmentation illustre les défis auxquels sont confrontés les héritiers politiques du parti.

*Les idéaux de l’ABAKO : Indépendance et fédéralisme*

L’ABAKO, bien qu’ayant adopté une position claire sur l’indépendance immédiate, n’a jamais présenté de programme politique systématique. Lors de son installation en tant que bourgmestre de Dendale (actuel Kasa-Vubu) en avril 1958, Joseph Kasa-Vubu demanda l’autonomie interne avant d’exiger l’indépendance sans condition. Ce mot d’ordre devint le cri de ralliement des militants de l’ABAKO et un catalyseur des revendications populaires.

*L’héritage politique de l’ABAKO*

Outre Kasa-Vubu, plusieurs figures issues de l’ABAKO ont marqué l’histoire congolaise. Daniel Kanza, vice-président du parti, fut le premier bourgmestre de Kinshasa, tandis que son fils, Thomas Kanza, premier universitaire congolais diplômé en Belgique, devint membre du gouvernement Lumumba.

Cependant, l’ABAKO fut dissoute en 1966, lorsque Mobutu Sese Seko instaura un régime autoritaire basé sur le parti unique, le Mouvement Populaire de la Révolution (MPR).

*Une reconnaissance en suspens*

À ce jour, l’ABAKO reste peu reconnue pour sa contribution décisive à l’indépendance congolaise. Les luttes internes, la division et le manque d’efforts de mémoire collective ont occulté son héritage. Pourtant, réhabiliter l’ABAKO comme un acteur clé de l’histoire nationale permettrait de renforcer le sentiment d’identité et d’unité autour de la lutte pour l’émancipation.

Alors que la RDC honore ses martyrs de 1959, il est peut-être temps de réévaluer le rôle de l’ABAKO dans l’histoire du pays et de lui redonner la place qu’il mérite au panthéon des forces politiques ayant forgé l’indépendance congolaise.

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