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RDC : Le projet de pont Kinshasa-Brazzaville accusé de « capitulation » face à la souveraineté économique (ACAJ)

Par S. Tenplar Ngwadi

La construction d’un pont-route-rails entre Kinshasa et Brazzaville, projet phare de la coopération régionale, suscite une vive controverse en République Démocratique du Congo (RDC). L’Association Congolaise pour l’Accès à la Justice (ACAJ) dénonce ce projet, qu’elle qualifie de « capitulation éhontée » de la RDC en matière de souveraineté économique et maritime. Selon l’ONG, ce projet mettrait en péril les intérêts stratégiques du pays en renforçant sa dépendance aux ports étrangers.

Dirigée par l’avocat Georges Kapiamba, l’ACAJ a exprimé son indignation face à la relance des études techniques relatives à ce projet, dont le coût est estimé à 700 millions de dollars. L’organisation déplore que le gouvernement s’investisse dans ce chantier, alors que le projet de port en eaux profondes de Banana, essentiel pour garantir l’accès direct de la RDC à l’océan Atlantique, demeure au point mort. Elle rappelle que le président Félix Tshisekedi s’était engagé à ne pas lancer les travaux du pont avant la mise en service du port de Banana.

L’ACAJ pointe du doigt le retard du projet du port en eaux profondes, confié à la firme qatarie DP World, qu’elle considère comme crucial pour la souveraineté économique de la RDC. Ce port permettrait au pays de réduire sa dépendance aux ports étrangers pour ses importations et exportations. En revanche, l’ONG estime que la construction du pont-route-rails renforcerait la domination du port de Pointe-Noire, au Congo-Brazzaville, géré par le groupe Bolloré.

L’organisation questionne les motivations derrière cette décision, évoquant un « lobby d’affairistes congolais » qui aurait œuvré pour faire passer le projet de pont en priorité. Selon l’ACAJ, ce même groupe aurait permis à l’opérateur portuaire MCTC de prendre le contrôle de plusieurs quais du port de Matadi dans des conditions jugées opaques.

L’ACAJ avertit des conséquences économiques désastreuses de ce projet. Actuellement, plus de 70 % des cargaisons à destination de la RDC transitent par le port de Pointe-Noire, en raison des limitations du fleuve Congo. La construction du pont-route-rails pourrait pérenniser cette situation, consolidant le monopole du port de Pointe-Noire et fragilisant davantage l’économie congolaise. L’ONG qualifie ce scénario de « dumping savamment réfléchi ».

L’ACAJ appelle les décideurs congolais à préserver la souveraineté économique du pays, définie comme la capacité d’un État à déterminer ses choix économiques sans interférences extérieures. Selon l’organisation, sans un port en eaux profondes opérationnel et compétitif, le pont-route-rails ne profiterait qu’à la République du Congo et à ses partenaires, notamment le groupe Bolloré.

Enfin, l’ONG exhorte l’Assemblée nationale et le Sénat à user de leurs pouvoirs constitutionnels pour bloquer toute participation de la RDC à ce projet tant que le port de Banana ne sera pas opérationnel. Elle insiste sur l’importance stratégique du port pour l’avenir du pays et dénonce une « capitulation » du gouvernement face à des intérêts étrangers.

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