
L’ancien président congolais Joseph Kabila, installé loin des feux de la rampe depuis sa défaite en 2018, a-t-il vraiment foulé le sol congolais ? Une rumeur persistante l’annonce à Goma, capitale de la province du Nord-Kivu, information confirmée par plusieurs sources locales par son entourage ce vendredi. D’autres sources, plus prudentes, évoquent sa présence à Kigali, alimentant les spéculations sur une éventuelle traversée de la frontière et un retour imminent sur la scène politique congolaise.
Après des mois d’exil en Afrique australe, Joseph Kabila avait officialisé son intention de rentrer au pays dans une déclaration datée du 8 avril. Un retour motivé, selon ses propres termes, par la « dégradation de la situation sécuritaire » et la « déliquescence » des institutions. « J’ai pris la résolution de rentrer, sans délai, au pays », écrivait-il, ajoutant vouloir entamer son retour par l’est du territoire, « parce qu’il y a péril en la demeure. »
Un timing pour le moins sensible. Ce retour intervient alors que les Forces armées de la RDC (FARDC) sont engagées dans des combats acharnés contre l’Alliance Fleuve Congo (AFC/M23) dans la région de l’Est. Une région déjà fragilisée par des années de conflits et où la présence de l’ancien chef d’État pourrait être interprétée de différentes manières.
Soupçons et dénégations
Le spectre d’une implication de Joseph Kabila dans le conflit plane depuis des mois. En mars dernier, lors d’une rencontre à Johannesburg avec l’ancien président sud-africain Thabo Mbeki, Kabila avait catégoriquement rejeté les accusations le liant au M23, qualifiant ces soupçons d’ « infondés ». Il avait alors plaidé pour une « approche endogène » de la crise congolaise, sans pour autant dissiper les doutes.
Ces soupçons persistent, attisés par des voix influentes au sein de la classe politique congolaise. Jean-Pierre Bemba, actuel vice-Premier ministre et ministre de la Défense, a récemment affirmé depuis Kikwit détenir des « preuves » impliquant Joseph Kabila dans les violences armées, promettant de les révéler prochainement.
Au-delà des questions sécuritaires, le retour de Joseph Kabila intervient dans un contexte politique particulier. Son parti, le Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD), vient de célébrer son 23e anniversaire, affichant ouvertement son ambition de relancer ses activités, six ans après la défaite cuisante à la présidentielle de 2018. Le retour de son leader charismatique, bien que controversé, pourrait dynamiser les troupes et redonner un souffle nouveau aux ambitions du parti.
La question cruciale reste de savoir quelles sont les intentions réelles de Joseph Kabila. Simple observateur désireux de contribuer à la résolution de la crise, ou acteur politique déterminé à reprendre sa place sur l’échiquier congolais ? Son retour, quoi qu’il en soit, suscite déjà de vives réactions et pourrait bien bouleverser le fragile équilibre politique de la RDC. La situation est à suivre de près.